Le Banc

Tout commence le 20 mars par une annonce comme j’en vois des dizaines : on recherche sur Lyon un homme de 60 – 65 ans pour jouer un rôle dans un court métrage réalisé par un professionnel. Comme c’est un court métrage ce n’est pas rémunéré mais comme c’est à Lyon, les frais sont raisonnables et cela ferait du matériel pour une future bande démo. Quelques minutes après l’envoi de ma candidature je reçoit une réponse enthousiaste du réalisateur pour qui je correspond exactement au personnage qu’il recherche. Les premiers jours d’avril sont consacrés à envoyer des essais vidéo, à discuter du personnage, des dialogues et convenir d’une date pour le tournage ; ce sera le 28 mai.

De son côté le réalisateur (AK) constitue son équipe technique et recrute les autres rôles dont l’actrice principale qui jouera en tête à tête avec moi sur les 2/3 du film. Je commence alors à réaliser que le projet est lancé, que rien ne l’arrêtera et que j’ai 35 répliques à savoir par cœur pour pouvoir les jouer au mieux. Nous sommes début mai et je dois gérer le projet Belle Hélène en parallèle jusqu’au 18 mai date du dernier concert. Dans ces cas là, une seule technique : avoir le texte avec soi pour le travailler à chaque instant de temps libre, en pause, en voiture, le soir avant de m’endormir… Avec tous les moyens de mémorisation possibles, visuels, auditifs, répétition. Une de mes méthodes favorite est d’apprendre les premières lettres de chaque phrase par groupe de 5 ( les doigts de la main ). Deux répétitions sont organisées la semaine précédent le tournage, cela me permet de rencontrer Andrei, le réalisateur et Joanna l’actrice et, la veille du tournage, miracle, je connais mon texte par cœur !

Rendez-vous à 8h30 ce mercredi 28 mai à Lyon au Parc de la Tête d’or, côté est, à proximité du Banc, élément essentiel du film. Maquillage, coiffure, petits gâteaux, café, rien ne manque pour cette journée qui s’annonce intense.

Comme souvent le tournage commence par la fin. La dernière scène réunit 5 comédiens et un chien dirigé à grands coups de croquettes. Elle est terminée vers 13h ce qui laisse l’après-midi après une pose déjeuner pique-nique pour la scène en duo. En résumé une jeune influenceuse voit sa vidéo perturbée par la présence d’un homme dans le champ de sa caméra. Elle veut filmer, il veut rester, un vrai dialogue de sourd qui finira par l’intervention malicieuse d’une petite fille. Le film doit être présenté à des concours de court métrages très rapidement.

Une journée c’est court pour réaliser 8 à 10 minutes de film, en moyenne pour un long métrage on compte 3 à 6 semaines de tournage soit environ 6 minutes par jour. De plus un tournage dans un lieu public est sans cesse perturbé par les joggeurs, le passage régulier des trains, les cris des enfants du terrain de jeu, une sirène, un avion, de quoi user patience et concentration de toute l’équipe et surtout des acteurs dont on demande une performance en milieu hostile comme si on était en studio. Pour ma part je n’avais aucune expérience professionnelle à ce niveau. Mon plus grand « rôle » est à ce jour celui du Maitre dans A un poil près réalisé avec Ciné Passion, association de cinéma amateur.

La direction d’Andrei, son coaching, sa bienveillance et la patience, la gentillesse et le métier de Joanna ma partenaire m’ont permis finalement de réussir cette épreuve difficile. Vers 18h30, soit presque à l’heure prévue, et malgré une averse inattendue, le clap de fin résonnait dans le parc enfin plus calme.

J’étais littéralement épuisé, au bout de ma vie, mais très satisfait d’avoir terminé et, à mon sens, plutôt bien terminé le tournage. Il faut maintenant attendre la sortie du film pour juger du résultat, je sais que les monteurs vont faire des miracles pour transformer toutes les prises en un beau court métrage.

Il est 20h, je suis sur l’autoroute à l’arrêt dans les bouchons entre Lyon et Orange, tout le temps de me repasser le film et apprécier le calme après la tempête. Demain est un autre jour, je serai une silhouette dans L’Or Bleu, la saga de l’été de France2, avec Tom Leeb et Barbara Probst